Par le Secrétariat de l’OMM
L’OMM et la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) considèrent toutes deux que les inlandsis sont un élément essentiel du Système mondial d’observation du climat. Il n’est cependant pas facile de suivre l’évolution de ces vastes couches de glace dans les régions lointaines de l’Arctique et de l’Antarctique; à l’échelle du globe, ce n’est possible qu’au moyen de satellites. De grands progrès doivent être accomplis dans la collecte de jeux de données continus et mondiaux pour mieux comprendre et anticiper les changements qui surviennent dans l’étendue et le volume des nappes glaciaires ainsi que leurs conséquences, sur le niveau de la mer par exemple. La coopération internationale est la seule façon d’y parvenir. Depuis 2011, le Groupe des activités spatiales pour les régions polaires de l’OMM s’emploie à réunir toutes les agences spatiales dont les satellites sont munis d’instruments capables d’observer les inlandsis et d’autres variables de la cryosphère. Il privilégie les besoins des utilisateurs, dialogue avec les autorités scientifiques dans le domaine polaire et soutient l’élaboration de produits, à partir de capteurs embarqués, pour la recherche et les applications cryosphériques. Il met à profit les résultats des activités de collecte de données satellitaires légués par l’Année polaire internationale.
Depuis deux ans, les spécialistes des inlandsis ont procédé à l’examen des besoins des utilisateurs en matière d’observations afin d’informer le Groupe des exploitants de satellites. Des enquêtes sur la science des nappes glaciaires et sur les impacts du changement climatique ont permis de résumer les attentes de plus de soixante experts dans le monde.
Les utilisateurs ont souligné l’importance de détenir des relevés continus de données à basse résolution sur l’intérieur des inlandsis et de données à haute résolution sur la périphérie pour mesurer la vitesse d’écoulement et les lignes d’échouage (zones où le glacier se détache du sol et devient un plateau flottant) et, notamment, modéliser les grands courants de glace rapides et les systèmes de glaciers.
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Pendant dix-sept ans, le satellite canadien RADARSAT 1 a transmis une foule de données SAR sur les régions polaires, notamment la mission de cartographie de l’Antarctique en 1997 et sa toute dernière mission, la surveillance du Groenland par interférométrie SAR en 2013.
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Les satellites à orbite polaire équipés de radars à synthèse d’ouverture (SAR) observent le globe par tous les temps, de jour comme de nuit, capacité propice à la mesure de la topographie et de la variabilité des nappes glaciaires. Les instruments SAR utilisent les signaux de radars (dans les bandes L, C ou X) et offrent généralement le choix entre plusieurs modes d’acquisition qui déterminent la couverture spatio-temporelle des jeux de données. Les besoins scientifiques pour l’observation des inlandsis au moyen de radars SAR ont été analysés, rassemblés et transmis au Groupe des activités spatiales1. Le document suggère un lancement échelonné de campagnes de col- lecte de données pour la surveillance de l’Arctique et de l’Antarctique et énumère les domaines prioritaires. Pour répondre à ces besoins, le Groupe met à contribution les moyens de plusieurs agences spatiales (voir l'encadré ci-contre), qui composent une "constellation virtuelle" de missions satellitaires SAR coordonnées.
La phase I
La phase I s’est déroulée en 2013; une question cruciale était la disponibilité de systèmes de détection SAR et la possibilité de capter des images, vu l’arrêt récent des importants capteurs ASAR (ESA, Europe) et PALSAR (JAXA, Japon) et le lancement prochain de nouveaux capteurs. Toutefois, les systèmes RADARSAT (ASC et MDA, Canada), TerraSAR-X (DLR, Allemagne) et COSMO-SkyMed (ASI, Italie) se sont chargés de l’acquisition de données sur l’Arctique, en particulier sur les calottes glaciaires du Groenland, du Svalbard et du Nord canadien. Le satellite canadien RADARSAT-1 a assuré en mode d’imagerie fine la couverture du Groenland par interférométrie SAR en bande C, de janvier à mars (juste avant que cette mission prenne elle-même fin); les données étaient reçues à la station norvégienne de Tromsø. Dans le même temps, on procédait à la collecte de données en bande X sur les glaciers à écoulement rapide des côtes ouest et est du Groenland.
Pendant une bonne partie de l’année 2013, RADARSAT-2 a procuré en mode SAR de visée à droite la couverture interférométrique répétée des régions côtières de l’Antarctique, de 80 degrés Sud jusqu’au littoral; pour leur part, les missions allemandes et italiennes en bande X ont acquis des jeux de données détaillés sur certains glaciers émissaires à écoulement rapide dans l’Antarctique.
L’acquisition, la réception et le traitement des données ont été possibles grâce à la participation des agences menant à bien des missions SAR et à l’appui soutenu d’autres agences spatiales (ESA, NASA, Centre spatial norvégien) et de partenaires nationaux (Alaska Satellite Facility, Kongsberg Satellite Services AS, MacDonald Dettwiler and Associates).
Les résultats obtenus dans le cadre de la première phase comprennent à ce jour la planification de l’observation coordonnée des inlandsis et l’acquisition de données SAR, comme suit:
• Recensement des besoins en matière de connaissances scientifiques et d’observations des nappes glaciaires;
• Élaboration de plans d’acquisition coordonnée de données SAR pour la surveillance des nappes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique;
• Acquisition de jeux de données InSAR par RADARSAT- 1 au-dessus du Groenland et couverture de l’Antarctique par RADARSAT-2;
• Acquisition de jeux de données InSAR détaillés par TerraSAR-X au-dessus de certaines zones côtières du Groenland et de l’Antarctique; et
• Début du traitement des données SAR et de la mise au point de produits.
Les plans pour la phase II
Avec le lancement prochain du satellite japonais ALOS-2 et du satellite européen Sentinel-1A cette année, le Groupe des activités spatiales pour les régions polaires sera en mesure de coordonner les observations d’une plus grande constellation de satellites. La couverture répétée des inlandsis des pôles Nord et Sud devrait durer deux ou trois années consécutives, avec un nombre accru de missions.
L’acquisition de données SAR par les satellites RADARSAT- 2, TerraSAR-X, COSMO-SkyMed, ALOS-2 et Sentinel- 1 est prévue de 2014 à 2016. Pour ce qui est du Groenland et de l’Antarctique, la couverture par le satellite japonais ALOS 2 fait partie de la Stratégie d’observation de base, tandis que la couverture SAR par le satellite européen Sentinel-1A fait partie de la stratégie du programme Copernicus pour les applications relatives aux inlandsis et au climat. Le Canada prévoit en 2014 l’acquisition de données en mode SAR de visée à gauche par RADARSAT 2 afin d’étudier le centre de
l’Antarctique, au sud du 78e parallèle. Les missions allemandes et italiennes en bande X devraient comprendre des séries temporelles de glaciers à écoulement rapide, au Groenland comme dans l’Antarctique. Une stratégie inter-agence détaillée d’observation coordonnée pour la phase II sera établie et adoptée en 2014.
Les perspectives
Le Groupe des activités spatiales pour les régions polaires permet de coordonner l’acquisition de données par diverses missions SAR, de manière à fournir les observations des inlandsis qui répondent aux objectifs fixés par les milieux scientifiques internationaux. Les satellites des agences participantes continueront de surveiller les nappes glaciaires et d’alimenter les archives de produits issus de l’observation de la Terre. Par cette démarche, les agences spatiales témoignent de leur engagement constant à répondre aux besoins d’images indispensables pour étudier diverses questions fondamentales de la science.
Le document SAR Science Requirements for Ice Sheets est le premier d’une série de textes que produira le Groupe des activités spatiales. Ce dernier s’emploie actuellement avec la communauté scientifique à recenser les besoins d’observations pour l’étude du pergélisol, de la neige et des glaces de mer. Ses prochaines communications décriront les progrès accomplis dans le domaine des inlandsis, mais feront aussi le point sur les mesures prévues pour répondre à d’autres besoins.
Remerciements
Bernd Scheuchl (Université de Californie à Irvine, États-Unis d’Amérique, courriel: bscheuch@uci.edu), correspondant scientifique du Groupe des activités spatiales, a rédigé le document SAR Science Requirements for Ice Sheets (mai 2013). Au nom de ses collègues du Groupe de travail pour la coordination SAR, Yves Crevier (Agence spatiale canadienne, courriel: yves. crevier@asc-csa.gc.ca) a supervisé la conception et la production par Dirk Werle et Don Ball d’une brochure qui a servi à rédiger le présent article. Nous remercions vivement de leur apport MDA, K-SAT, ASF et e-GEOS.
Contribution du Secrétariat de l’OMM
Stephan Bojinski (sbojinski@wmo.int), Groupe des activités spatiales pour les régions polaires (www.wmo.int/pages/ prog/sat/pstg_en.php), Programme spatial de l’OMM.
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1 Le Groupe des activités spatiales pour les régions polaires de l’OMM a mis sur pied un groupe de coordination SAR afin d’aider à recueillir et à utiliser les jeux de données émanant de radars SAR à bord de satellites.
2 Préparé par B. Scheuchl en 2013, que l’on peut consulter à l’adresse suivante: www.wmo.int /pages/prog/sat /meetings/documents/TaskGroup-3_Doc_08-02-02_SARReq-IS.pdf