Résolution sur la politique unifiée de l'OMM en matière de données (Cg-Ext(2021))

Ces dernières décennies, on a assisté à une véritable envolée de la demande de données de surveillance et de prévision pour ce qui concerne le temps, le climat et l'eau, à l’appui des services essentiels dont ont besoin tous les secteurs de la société, à la fois pour favoriser la prospérité économique et pour relever d'importants défis tels que le changement climatique, les préoccupations en matière de sécurité alimentaire et l’augmentation de fréquence et d’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes.

Pour répondre à cette demande croissante, il est nécessaire de réviser et de renforcer l’échange libre et gratuit entre tous les Membres de l’OMM de données d’observation provenant de toutes les régions du globe et de produits de données. Parallèlement, il faut parvenir à un accès équitable aux produits de données améliorés qui en résulteront, afin de garantir qu'aucun Membre n’est laissé pour compte. Alors que les responsabilités des Services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN) ne cessent de s’étendre, de plus en plus de domaines d’application débordant du cadre habituel des activités liées au temps, au climat et à l’eau doivent être soutenus par les systèmes d’observation, d’échange de données et de modélisation de l’OMM. La politique de l’OMM en matière de données doit donc évoluer pour inclure, en les associant, des domaines tels que la composition de l’atmosphère, les océans, la cryosphère et la météorologie de l’espace.

Le succès de la surveillance et des prévisions du temps et du climat ainsi que l’augmentation rapide de la demande d'informations supplémentaires sur l'impact des phénomènes météorologiques, climatiques et associés ont renforcé à parts égales la nécessité d'échanger des données. Cette situation a conduit l'OMM à adopter une approche stratégique intégrée du système Terre pour la surveillance et les prévisions. Ce sont donc non seulement des données météorologiques, mais aussi des données d’autres disciplines et domaines connexes du système Terre qui sont attendues. Dans un souci d'efficacité, de cohérence et de transparence, l'OMM a décidé de regrouper ses déclarations de politique en matière de données en une seule politique unifiée pour l'échange de données sur le système Terre.

Le rôle de la politique de l'OMM en matière de données est d'établir un accord entre les Membres de l'OMM sur les principes généraux et la portée de l'échange international de données sur le système Terre.

Le temps et le climat, s’ils ont des effets à l'échelle locale, sont mondiaux par nature. Ils ne connaissent pas de frontières. En effet, l'atmosphère terrestre n'a pas de frontières horizontales, ce qui signifie que toutes les activités de surveillance et de prévision du temps et du climat doivent reposer sur une modélisation à l'échelle mondiale. La qualité de la modélisation dépend quant à elle de l'accès constant à un volume suffisant d'observations provenant de toutes les régions du monde. Pour entreprendre de comprendre et de prévoir l'atmosphère et le système climatique d'une manière globale, il est donc essentiel que l'échange de données soit international.

L’un des principaux objectifs de la création de l’OMM en 1951 était l’instauration d'un mécanisme de coordination pour l’acquisition et l’échange international de telles données, comme le stipulent les alinéas a) et b) de l'article 2 de la Convention de l'OMM. La politique de l'OMM en matière de données, telle qu'elle est actuellement énoncée dans trois résolutions distinctes du Congrès météorologique mondial (résolution 40 (Cg-XII)). – Politique et pratique adoptées par l'OMM pour l’échange de données et de produits météorologiques et connexes et principes directeurs applicables aux relations entre partenaires en matière de commercialisation des services météorologiques, résolution 25 (Cg-XIII) – Échange de données et de produits hydrologiques, et résolution 60 (Cg-XVII) – Politique de l’OMM pour l’échange international des données et des produits climatologiques nécessaires à la mise en œuvre du Cadre mondial pour les services climatologiques), encadre de manière générale l’échange international de données sur le temps, le climat et l’eau.

Alors qu'il est désormais reconnu que l'approche intégrée et sans discontinuité du système Terre est cruciale pour la réalisation de l'ensemble des activités météorologiques et pour la prestation, par les Membres de l’OMM, des services météorologiques, climatologiques et environnementaux essentiels, la politique de l'Organisation en matière de données doit être conçue de manière à mieux favoriser l’accomplissement de ces objectifs par l'échange international de certaines données sur le temps, le climat et l'environnement.

L’actualisation proposée de la politique en matière de données stimulera et renforcera l'échange d'observations dans tous les domaines et dans toutes les disciplines, ce qui permettra d'améliorer considérablement les capacités de modélisation du système Terre de la communauté ainsi que la qualité des produits de modélisation.

Grâce à la politique en matière de données, tous les Membres bénéficieront d’un accès libre et gratuit à une gamme beaucoup plus large de produits de modélisation du système Terre, ce qui les aidera à améliorer et élargir la palette de services qu'ils offrent à leurs parties prenantes.

Augmenter le nombre d'observations qui sont partagées au niveau international pour être utilisées dans les modèles mondiaux et régionaux de prévision numérique du temps contribuera à améliorer sensiblement la qualité des produits de données. Cette avancée sera mondiale, mais elle sera particulièrement prononcée dans les régions où la couverture actuelle en données d'observation est faible, notamment dans de nombreux pays en développement.

Augmenter le nombre de produits de modélisation auxquels tous les Membres peuvent librement accéder aidera notamment les pays en développement Membres de l'OMM à améliorer considérablement la portée et la qualité des services météorologiques et climatologiques qu'ils peuvent offrir à leurs parties prenantes.

En raison des rôles distincts et complémentaires des textes réglementaires et de la politique unifiée de l’OMM en matière de données, cette dernière n'imposera en principe pas aux Membres de nouvelles obligations en matière d'échange de données. Les obligations spécifiques d'échange de certains jeux de données (appelés «données fondamentales» dans le texte de la politique en matière de données) sont énoncées dans le Règlement technique de l'OMM, et non dans la politique même. Ces obligations peuvent changer au fil du temps, à mesure que le Règlement technique de l'OMM est mis à jour, sous l'autorité du Congrès.

D'autre part, on s’attend à ce que le groupe d'entités qui participe à l'échange de données s’élargisse considérablement. La politique unifiée en matière de données préconise un large échange de données entre les acteurs concernés, alors que les déclarations actuelles de l'OMM sur ce sujet, en particulier la résolution 40 (Cg-XII), se réfèrent de façon plus restrictive à l'échange entre les SMHN.

Lorsque le projet de résolution sur la politique unifiée sera soumis au Congrès pour examen, une analyse détaillée et une liste des jeux de données fondamentales qui devraient être échangés dans le cadre de la réglementation actuelle y seront joints, pour information. L'OMM prévoit de publier cette liste et de la mettre à jour au fur et à mesure de l'évolution du Règlement technique.

L'OMM est prête à aider ses Membres à mettre en œuvre la politique unifiée en matière de données de plusieurs façons, et notamment à:

• Poursuivre le développement de systèmes techniques visant à faciliter l'échange de données, tels que la version 2.0 du Système d'information de l'OMM et le Système mondial de traitement des données sans discontinuité, compte tenu notamment des besoins et des capacités techniques des pays en développement Membres;
• Mobiliser des ressources et apporter un soutien ultérieur, via des mécanismes tels que les systèmes d'alerte précoce aux risques climatiques et des interactions entre pairs, pour aider les pays en développement Membres à tirer pleinement parti du volume accru de données de prévision et de surveillance auquel ils auront accès grâce à la politique actualisée en matière de données;
• Coordonner un soutien technique et financier direct via le mécanisme de financement des observations systématiques (SOFF) pour favoriser l'échange international d'observations du Réseau d'observation de base mondial (ROBM) aux fins de la prévision numérique mondiale;
• Soutenir des activités nationales et régionales, ou à y prendre part, pour améliorer la mise en œuvre de la politique de l'OMM en matière de données, en réunissant à la fois des SMHN et d'autres entités gouvernementales, de recherche et du secteur privé;
• Élaborer des supports de communication expliquant le contexte, la portée et les avantages de la politique de l'OMM en matière de données.

La politique en matière de données représente un engagement général des Membres à échanger certaines données à certaines fins. Afin que la mise en œuvre de la politique puisse évoluer et s'étendre avec le temps selon les besoins, l'annexe 1 de la résolution répertorie uniquement les domaines, disciplines et grandes catégories de jeux de données couverts par la politique et, dans chacun d'eux, des références au Règlement technique renvoient aux exigences détaillées. Des précisions sur les jeux de données qui appartiennent à chaque catégorie au titre de la politique figurent (ou, dans certains cas, figureront ultérieurement) dans les dispositions pertinentes du Règlement technique de l'OMM. 

L’actualisation proposée permettra d'échanger des données au XXIe siècle de manière plus complète, plus souple et plus simple.

Une approche complète: Actuellement, la politique de l'OMM en matière de données est présentée dans trois résolutions distinctes du Congrès couvrant trois domaines, à savoir la résolution 40 (Cg-XII), sur le temps, la résolution 25 (Cg-XIII), sur l'eau, et la résolution 60 (Cg-17), sur le climat. En revanche, la résolution sur la politique unifiée en matière de données permet de regrouper sept domaines, soit l'ensemble des données de l'OMM sur le système Terre, dans une seule déclaration de politique générale. En outre, la nouvelle politique ne s'adresse plus uniquement aux SMHN, mais prend en compte tous les partenaires, y compris le secteur privé et le milieu universitaire.

Une approche souple: Il est possible d'actualiser en détail la définition des «données fondamentales» et des «données recommandées» par des mises à jour du Règlement technique, plutôt que par des amendements à la résolution même. Ces mises à jour restent soumises à l'approbation du Congrès, mais, en raison de leur portée et de leur objectif restreints, le processus d'approbation les concernant est généralement beaucoup moins complexe que celui qui se rapporte aux politiques en matière de données. Une approche applicable en pratique: Des trois résolutions existantes sur la politique en matière de données, seule la résolution 40 (Cg-XII) (échange de données météorologiques) exige des Membres qu'ils échangent les données minimales requises pour faciliter la prise de décision à tous les niveaux, à l'appui des services publics essentiels. La nouvelle politique permettra, à terme, de qualifier de «données fondamentales» les données relatives au système Terre.

La politique proposée concerne en principe tous les fournisseurs et utilisateurs de données sur le système Terre, y compris les SMHN, d'autres organismes publics, le milieu universitaire et le secteur privé.

Pour le secteur public, établir une catégorie de «données fondamentales» permet de garantir l'accès universel, libre et gratuit aux données qui sont indispensables à la réalisation de l'ensemble des activités météorologiques et à la prestation des services météorologiques, climatologiques et environnementaux essentiels. Cette catégorie comprend toutes les données «fondamentales» acquises par le secteur public, qu'il s'agisse de données provenant d'infrastructures détenues et exploitées par les Membres ou de données provenant d'autres sources et acquises par le secteur public pour son usage.

Pour le secteur privé, l'avantage immédiat sera d'avoir accès à un ensemble beaucoup plus large de données de surveillance et de prévision du système Terre, ce qui lui permettra de générer des produits à valeur ajoutée et de fournir des services adaptés à des utilisateurs spécifiques. La politique clarifie également les types de données qui doivent être échangées («données fondamentales») et ceux qui peuvent être échangés sous certaines conditions, telles que des licences ou des droits d'accès («données recommandées»).

Cette approche globale donnera accès à des canaux supplémentaires d'échange de données qui rendront les services météorologiques, climatologiques et hydrologiques bien plus efficaces, et, partant, encore plus utiles pour les parties prenantes et les usagers du monde entier.

Les chercheurs jouent un double rôle important au sein de la communauté de l'OMM. Ils sont à la fois des fournisseurs et des utilisateurs de données. La nouvelle politique en matière de données garantit aux chercheurs un accès libre et gratuit à un large éventail de données fondamentales sur le système Terre. Par ailleurs, elle recommande de leur accorder un accès libre et gratuit à toutes les données sur le système Terre. Elle reconnaît en outre la nécessité de préciser la source des données sur le système Terre mises à disposition par les chercheurs à des fins opérationnelles.

Les Membres échangent actuellement une grande variété de données entre eux. Toutefois, en raison du caractère dépassé de diverses déclarations de politique générale et de la difficulté de mettre celles-ci à jour, les échanges ont progressivement diminué. Cette situation accroît le risque de fragmentation dans certains domaines. La carte ci-dessous, issue du Système de contrôle de la qualité des données du Système mondial intégré des systèmes d'observation de l'OMM (WIGOS), présente les observations de surface actuellement échangées par les Membres.

Cet exemple montre qu'actuellement l'interprétation et la mise en œuvre de la politique de l'OMM en matière de données sont très variables d'un Membre à l'autre. Cette hétérogénéité empêche la communauté de l'OMM d'exploiter pleinement le potentiel de ses données et éléments scientifiques, notamment pour la prévision numérique du temps, afin de répondre aux demandes croissantes de produits de haute qualité.

De nombreuses analyses économiques entreprises par des gouvernements et des organisations internationales dans diverses régions du monde ont abouti à la même conclusion: pour bénéficier des avantages socio-économiques que présentent les données sur le système Terre, le moyen le plus efficace est de loin de faire en sorte qu'elles parviennent au plus grand nombre d'utilisateurs possible. La meilleure façon d'y arriver est d'adopter des politiques de libre-échange des données, comme celle que l'OMM examine actuellement. Les entités publiques et privées peuvent ensuite utiliser ces données pour leurs propres domaines d'application spécifiques ou pour générer d’autres produits et services à valeur ajoutée, ce qui élargit encore la portée des données et accroît leur contribution globale aux avantages socio-économiques retirés.

S'agissant des observations, il est nécessaire, et non optionnel, de les échanger pour qu'elles aient un impact. La prévision numérique du temps à l'échelle mondiale est le pilier de toutes les activités de surveillance et de prévision du temps et du climat. Pour lancer une prévision numérique du temps, de grandes quantités d'observations sont assimilées dans un modèle du système Terre, afin d'estimer les conditions météorologiques initiales au plan mondial. Ce processus s'apparente à l'assemblage d'un puzzle représentant un instantané de la météo mondiale, dont les observations seraient les diverses pièces. Imaginez un puzzle de 1 000 pièces, avec 100 pièces situées aux États-Unis d’Amérique, 200 en Russie, 50 en Afrique du Sud, une ou deux à Singapour, etc. Pour pouvoir assembler ce puzzle et obtenir une image, il faudrait que toutes les pièces soient disponibles en un seul endroit. C'est la raison pour laquelle l'échange international d'observations est indispensable en météorologie. Les observations qui restent sur le lieu où elles sont effectuées n'apportent aucune valeur ajoutée aux activités de prévision.

Les observations qui ne sont même pas partagées entre les secteurs au niveau national limitent les retombées socio-économiques.

Aucun délai n'est fixé pour la mise en œuvre de la politique de l'OMM en matière de données. Cette politique établit un accord entre les Membres de l'OMM sur la portée et les principes généraux de l'échange international de données sur le système Terre. C’est aux Membres qu’il incombe de s'adapter à cette politique et de la mettre en œuvre. En effet, la Convention de l'OMM et le projet de politique unifiée reconnaissent les droits souverains des Membres de décider des données qui seront échangées et des modalités de tels échanges. 

La mise en œuvre au plan national de la politique en matière de données est la prérogative exclusive des Membres. Toutefois, l'OMM aidera activement, par tous les moyens possibles, les gouvernements des Membres, y compris les SMHN, à faire connaître les avantages de la politique en matière de données au moyen de supports de communication et d'événements d'information. L'OMM favorisera également le partage d'expériences entre Membres et mettra à disposition, si nécessaire, des exemples de mises en œuvre nationales réussies.

Si et quand la résolution sur la politique unifiée en matière de données est adoptée par le Congrès, l'ensemble de la communauté de l'OMM participera à sa mise en œuvre, depuis l'adhésion aux dispositions déjà adoptées du Règlement technique jusqu'à l’actualisation progressive du Règlement technique. Le Conseil exécutif supervisera la mise en œuvre globale de la politique, avec l'appui du Secrétariat de l'OMM. La Commission des infrastructures de l'OMM pilotera la mise à jour des dispositions pertinentes du Règlement technique dans chacun des sept domaines/disciplines, avec la participation des Membres. La Commission des services multipliera les contacts pour obtenir l'engagement des partenaires concernés en faveur de la poursuite de la mise en œuvre de la politique. Les conseils régionaux ont un rôle très important à jouer, par exemple en assurant la désignation d'experts régionaux compétents et leur participation aux travaux des commissions techniques, en mobilisant et encourageant les Membres sur les questions de politique en matière de données, et en recensant les capacités à développer. La mise en œuvre effective est du ressort des Membres.

Au sein du Secrétariat de l'OMM, le Département des infrastructures dirige l'élaboration des politiques, des pratiques et des règlements relatifs aux données, tandis que le Département des services aux Membres et ses bureaux régionaux fournissent un soutien et des services de nature générale.