Sommaire 56-4-2007

01 octobre 2007

L’Année polaire internationale (API) 2007/08 a été lancée avec succès par l’OMM et le Conseil international pour la science le 1er mars 2007. L’objectif fondamental de l’API est de favoriser une explosion d’activités scientifiques de recherche et d’observation coordonnées à l’échelle internationale et à caractère pluridisciplinaire, activités concentrées sur les régions polaires. L’Année polaire internationale donne l'occasion d'obtenir de longues séries chronologiques de données d’observation
icebreaker
sur l’état de l’atmosphère, de l’océan, de la cryosphère et d’autres composantes du système climatique dans les régions polaires. Elle permettra d’en savoir plus sur la variabilité des processus qui caractérisent l’environnement polaire et de faciliter la mise au point de techniques de pointe pour la prévision météorologique, l’océanographie opérationnelle et la prévision climatique et offre donc la possibilité d’améliorer encore les services hydrométéorologiques dans le monde entier à l’appui du développement socio-économique.

Pour attirer l’attention de la communauté internationale sur l’API et souligner le rôle joué par les régions polaires dans le système climatique mondial, le thème retenu pour la Journée météorologique mondiale de 2007 a été «La météorologie polaire: compréhension des incidences à l’échelle planétaire». Trois personnalités ont été invitées à prendre la parole à cette occasion. Dans son allocution, Arthur Chilingarov, éminent scientifique russe, spécialiste des sciences polaires, a qualifié l’Année polaire internationale de cadre de coopération internationale unique en son genre. Chris Rapley, Président du Comité scientifique pour les recherches antarctiques, a fait un exposé sur la fonte des glaces et les incidences planétaires du réchauffement des pôles. Quant à l’explorateur Mike Horn, qui, en 2006, a été le premier, avec Borge Ousland, à atteindre le pôle Nord à pied pendant la longue nuit de l’hiver arctique, il a fait un exposé intitulé «Expérience vécue — Agir pour le futur». Ces conférenciers ont fait de cette Journée une vitrine de l’API.

Ce numéro du Bulletin de l’OMM est une contribution substantielle au volet éducatif de l’API. L’éventail de disciplines scientifiques abordées est très large. Les projets de l’API répondent à la nécessité de comprendre les changements rapides observés récemment dans les régions polaires. Quatre grandes questions doivent être considérées d’urgence: le rétrécissement du manteau neigeux et la fonte des glaces; l’interaction des pôles et du reste de la planète; la qualité de la vie et la capacité d’adaptation des communautés polaires aux bouleversements écologiques et sociaux; et la nécessité de repousser les limites du savoir scientifique. L’OMM, grâce aux activités de recherche et d’observation des Services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN), apporte une contribution importante à l’API dans les domaines de la météorologie polaire, de l’océanographie, de la glaciologie et de l’hydrologie.

Bien qu’en général les régions polaires soient éloignées des zones peuplées, il est indispensable de disposer de prévisions météorologiques fiables dans ces secteurs. Autour de l’Arctique, il faut des prévisions pour protéger les communautés indigènes et pour soutenir les opérations maritimes, le tourisme et les activités d’exploration et de production de gaz et de pétrole. Dans l’Antarctique, on doit disposer de prévisions fiables pour des opérations logistiques aériennes et maritimes, ainsi qu’à l’appui de programmes de recherche scientifique et du secteur du tourisme. Dans ces deux parties du monde, la prévision météorologique présente des enjeux particuliers. La mise en place de nouveaux systèmes de prévision météorologique et environnementale dans le cadre de projets THORPEX, élaborés pour l’API au titre du Programme mondial de recherche sur la prévision du temps, accélérera la production des informations hydrométéorologiques nécessaires pour surveiller et prévoir l’état de l’environnement polaire à des échéances très variées, allant de quelques heures à quelques semaines. Ces améliorations procureront à leur tour des avantages socio-économiques aux communautés polaires.

L’API offre l’occasion de procéder à une étude internationale de la composition chimique de l’atmosphère polaire dans les deux hémisphères. Il convient de souligner l’importance des mécanismes d’échange et des facteurs d’échange de corps chimiques à l’état de traces entre l’atmosphère, les terres émergées, les océans et les surfaces de neige et de glace, qui dépendent de l’état physique, chimique et biologique des composantes du système terrestre. Il faut s’intéresser aux interactions du climat, de la raréfaction de l’ozone dans la stratosphère et la couche limite et des changements environnementaux dus au transport de polluants sur de longues distances. Il est indispensable d’avoir une connaissance suffisante du système pour pouvoir quantifier les effets, sur l’atmosphère, de l’évolution future du climat et la part relative des surfaces neigeuses, terrestres et océaniques y compris les mécanismes de rétroaction correspondants.

Les études consacrées à la diminution de la couche d’ozone stratosphérique au-dessus de l’Antarctique — l’une des principales conséquences de l’interférence anthropique avec le système climatique mondial — constituent l’un des éléments clefs du volet atmosphérique de l’API. Pendant l’Année polaire internationale, les activités de recherche portant sur la stratosphère polaire recourent pour l’essentiel à la méthode Match qui a été mise au point pour mesurer avec précision le rythme de décroissance de l’ozone dans la stratosphère polaire. Les données pluriannuelles provenant des campagnes Match ont permis de mesurer l’influence des changements climatiques sur la déperdition d’ozone au-dessus de l’Arctique — ce qui est déterminant pour faire des projections dans ce domaine.

Depuis plus d’un siècle on reconnaît qu’il est nécessaire de mettre en place des systèmes d’observation intégrés dans les régions polaires, notamment dans les océans pour lesquels on dispose de peu de données. L’API offre de grandes possibilités à cet égard. Dans l’Arctique, il est envisagé d’établir un système intégré d’observation de l’océan Arctique et, dans l’Antarctique, un système d’observation de l’océan Austral. Ces deux systèmes permettront d’améliorer les capacités d’analyse et de prévision dans les domaines considérés et serviront directement les objectifs du Système mondial d’observation de l’océan.

Depuis quelques dizaines d’années, on observe des mutations significatives dans l’environnement polaire, notamment une diminution de la banquise permanente, un rétrécissement de la couverture neigeuse, la fonte accélérée des glaciers et du pergélisol et une diminution de la glace dans les cours d’eau et les lacs. L’Année polaire internationale, qui doit permettre de mieux observer et comprendre les transformations rapides que connaît la cryosphère polaire, ne pouvait pas avoir lieu à un moment plus opportun. Les données satellitaires sont essentielles pour l’établissement de nouveaux produits sur la cryosphère des hautes latitudes, car les données d’observation in situ sont rares, voire inexistantes, dans ces régions difficiles d’accès. Un projet intitulé Global Interagency IPY Polar Snapshot vise à obtenir des images instantanées — à haute résolution et couvrant une large gamme de longueurs d’ondes — des régions polaires. En outre, la Fédération de Russie prévoit de mettre un système à satellites sur une orbite très elliptique — du nom de Arctica — d’ici quatre ans, dont la mission sera d’observer la vitesse et la direction du vent, les nuages, la banquise et d’autres paramètres concernant l’Arctique.

L’Année polaire internationale 2007/08 devrait léguer un précieux héritage: des réseaux d’observation internationaux pluridisciplinaires, sans oublier la Veille mondiale de la cryosphère. Ces systèmes d’observation devraient procurer aux scientifiques et aux décideurs des informations en temps réel sur l’évolution de l’environnement polaire pendant les prochaines décennies.

Enfin, la prévision saisonnière statistique des cyclones tropicaux a beaucoup progressé depuis le début des années 80. En plus des prévisions relatives à l’ensemble de la saison cyclonique, on dispose aujourd’hui de prévisions mensuelles ponctuelles et de prévisions relatives à la probabilité d’impact. Les jeux mondiaux de données — notamment les différents produits de réanalyse — étant toujours plus accessibles, les prévisions statistiques des cyclones tropicaux ne cesseront de s’améliorer.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) se voit décerner le prix Nobel de la paix

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIECnobel), fondé et parrainé par l’OMM et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), et l’ex-Vice-Président américain et défenseur de l’environnement Al Gore se sont partagés le prix Nobel de la paix 2007. Cette distinction leur a été remise pour leurs efforts visant à expliquer la responsabilité de l’homme dans les changements climatiques et à promouvoir des mesures pour lutter contre ces changements. Les évaluations scientifiques du GIEC permettent à la communauté internationale de mieux comprendre les causes des changements climatiques et les actions à engager pour gérer plus efficacement les sols et les ressources en eau, et réduire ainsi la pauvreté et la vulnérabilité tout en favorisant un développement socio-économique durable.

Lorsqu’il a appris la nouvelle, le 12 octobre 2007, le Secrétaire général de l’OMM, Michel Jarraud, a déclaré qu’en décernant cette prestigieuse distinction au Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et, à travers lui, à la communauté scientifique tout entière, le Comité du prix Nobel a salué le rôle joué par le GIEC pour mieux éclairer la communauté internationale sur les incidences des activités humaines sur le climat de la planète. Il s’est dit persuadé que ce prix aura un effet catalyseur et qu’il incitera non seulement les décideurs mais chacun d’entre nous à exploiter au mieux les connaissances scientifiques sur les changements climatiques pour protéger la planète comme il se doit.


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