Le Bulletin de l’OMM sur les poussières atmosphériques esquisse les zones critiques d’aujourd’hui et de demain

19 octobre 2023

L’Organisation météorologique mondiale (OMM) vient de publier son rapport annuel concernant l’incidence et les dangers des tempêtes de sable et de poussière, ainsi que leurs impacts sur la société. On y examine aussi la possibilité que le changement climatique augmente le nombre de zones critiques à l’origine du phénomène.

En 2022, la moyenne mondiale des concentrations moyennes de poussières en surface excédait légèrement celle de 2021, en raison de l’augmentation des émissions dans le centre‑ouest de l’Afrique, la péninsule arabique, le plateau iranien et le nord-ouest de la Chine. C’est le Bodélé (Tchad, Afrique) qui aurait présenté les plus fortes concentrations annuelles moyennes de poussières en surface selon cette édition du Bulletin.

En 2022, des «points chauds» affichant des concentrations de poussière particulièrement élevées ont été relevés en Amérique centrale et du Sud, dans la majeure partie de l’Afrique centrale, en Espagne, sur la mer Rouge, la péninsule arabique, la mer d’Arabie et le plateau iranien, dans le golfe du Bengale, en Asie du Sud, dans le bassin de Tarim au nord-ouest de la Chine et sur l’océan Atlantique tropical, entre l’Afrique de l’Ouest et les Caraïbes (figure 1).

Two maps of the world with different temperatures.
(a) Annual mean surface concentration of mineral dust in 2022 (b) Anomaly of the annual mean surface dust concentration in 2022 relative to the 1981-2010 mean
Source: These results are derived from the Modern-Era Retrospective Analysis for Research and Applications, Version 2 (MERRA-2) (Gelaro et al. 2017)

Quelque 2 000 millions de tonnes de poussière entrent chaque année dans l’atmosphère, obscurcissant le ciel et nuisant à la qualité de l’air dans des régions situées parfois à des milliers de kilomètres de leur source et affectant les économies, les écosystèmes, le temps et le climat. Il s’agit essentiellement d’un processus naturel, mais une part non négligeable résulte d’une mauvaise gestion de l’eau et des terres.

La surveillance et les prévisions se sont affinées ces dernières années grâce aux progrès des modèles numériques et des systèmes d’observation. Le Système d’annonce et d’évaluation des tempêtes de sable et de poussière (SDS-WAS) mis sur pied par l’OMM en 2007 améliore sans cesse les alertes par ses centres régionaux spécialisés et allie les travaux de recherche et d’exploitation, lesquels font désormais partie de l’initiative internationale «Alertes précoces pour tous».

«L’OMM est déterminée à combattre ce risque majeur. Les tempêtes de sable et de poussière ont un impact sur la santé, les transports, y compris l’aviation, les transports terrestres par route et par rail, et l’agriculture. Cela nuit à la santé publique, à la sécurité et à l’économie», a déclaré le Secrétaire général de l’OMM, M. Petteri Taalas.

«L’initiative "Alertes précoces pour tous" entend améliorer les capacités de prévision et les services d’alerte courants en matière de tempêtes de poussière. Nous soutenons fermement la notion de services d’alerte précoce multidangers, qui réunit tous les risques dans un même cadre. Nous favorisons aussi la prévision axée sur les impacts, qui est au cœur de l’amélioration des alertes de tempêtes de sable et de poussière», a-t-il ajouté.

Mais il faut faire davantage, vu notamment la dégradation incessante de l’environnement et le changement climatique présent et futur.

«Les publications du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et les rapports de l’OMM sur l’état du climat montrent que les activités humaines ont une incidence sur les tempêtes de sable et de poussière. Ainsi, la hausse des températures, la sécheresse et une forte évaporation réduisent l’humidité du sol. Conjugué à une piètre gestion des terres, cela favorise l’apparition du phénomène», a poursuivi M. Taalas.

Zones critiques

Depuis quelques décennies, la région du Moyen-Orient, où convergent l’Asie, l’Afrique et l’Europe, souffre de processus de désertification et d’épisodes de poussière «alarmants», peut‑on lire dans le Bulletin. Les prélèvements d’eau massifs et la pression croissante sur les ressources hydrologiques aggravent les problèmes associés à un climat aride. Les observations par satellite montrent que la forte augmentation des émissions de poussières émane principalement des zones suivantes: une partie de la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan, certains secteurs de la République islamique d’Iran, la plaine de la Mésopotamie en Iraq, l’est de la République arabe syrienne et le cours inférieur du Tigre et de l’Euphrate près du golfe Persique.

Les zones les plus touchées par le transport à grande distance sont le nord de l’océan Atlantique tropical entre l’Afrique de l’Ouest et les Caraïbes, l’Amérique du Sud, la mer Méditerranée, la mer d’Arabie, le golfe du Bengale, le centre-est de la Chine, la péninsule coréenne et le Japon.

En 2022, toute la région de la mer des Caraïbes a été envahie de poussière provenant d’Afrique via le transport transatlantique et de fréquentes intrusions ont été rapportées cette année.

Dangers dans la région panaméricaine

Le rapport a été publié avant la Semaine du climat de l’Amérique latine et des Caraïbes qu’accueillait le Panama du 23 au 30 octobre. On y examine les solutions climatiques dans l’optique de la COP 28 prévue à Dubaï en décembre 2023.

Le rapport expose en détail une étude poussée des risques posés par la poussière en Amérique, compilée par 28 experts de l’antenne panaméricaine du Système d’annonce et d’évaluation des tempêtes de sable et de poussière de l’OMM. Une carte de vulnérabilité destinée aux décideurs montre les effets de la poussière sur la santé et la sécurité.

Les tempêtes de poussière ont des répercussions sur la navigation aérienne et le transport routier, elles réduisent la production des centrales solaires et propagent des agents pathogènes pour l’homme, tous facteurs qui nuisent aux économies locales et régionales. La perte d’éléments nutritifs du sol coûte plus de 8 milliards de dollars É.‑U. chaque année à l’agriculture des Amériques.

L’exposition aux particules de poussière a été associée à des problèmes sanitaires tels que crises cardiaques, mortalité cardiovasculaire, cancer du poumon et fièvre de la vallée aux États-Unis d’Amérique.

A map of the world with different types of pollution.
Summary of health and safety effects of airborne dust in the Pan-American region
Source: Tong et al., 2023b

Interactions avec le changement climatique

Le Bulletin souligne l’importance d’étudier plus avant les interactions futures entre les tempêtes de sable et de poussière et le changement climatique, ainsi que les modifications concomitantes des régimes de circulation générale et de précipitation.

Des recherches récentes ont évalué d’éventuels changements dans les émissions mondiales de poussières selon différents scénarios de réchauffement climatique. L’écart entre les années de référence (2015-2024) et les années à venir (2091-2100) pour trois scénarios de réchauffement climatique montre une hausse considérable des émissions en provenance des déserts de Gobi et du Taklamakan, de l’Asie orientale à l’Asie centrale, à mesure qu’augmente la température à la fin du siècle (figure 3).

Dans le désert de Gobi et en Asie centrale, la diminution de la couverture neigeuse et l’accélération des vents de surface dues au réchauffement devraient provoquer une hausse des émissions dues aux tempêtes de poussière pendant le mois de mars.

Les effets du réchauffement planétaire pourraient être moins prononcés dans le Sahara qu’en Asie, en partie à cause de l’absence de couverture neigeuse dans cette région.

A series of maps showing different areas of the world.
March average global SDS emissions for different climate scenarios using the Meteorological Research Institute Earth System Model.
Source: Adapted from Maki et al. (2022).

Émissions moyennes de sable et de poussière dans le monde en mars selon différents scénarios climatiques, d’après le modèle du système Terre de l’Institut de recherche météorologique. a) Émissions moyennes pendant la période de référence (2015-2024) pour toutes les expériences (25 membres). b)‑d) Rapport entre les valeurs de la période de référence (2015-2024) et les émissions moyennes futures (2091-2100) dans les scénarios b) SSP1-1.9, c) SSP2-4.5 et d) SSP5-8.5. La moyenne de cinq membres de l’ensemble est indiquée pour chaque scénario. Les teintes bleues indiquent une baisse des émissions par rapport à la période de référence, les teintes rouges une hausse des émissions par rapport à la période de référence. Les zones ombrées indiquent les régions statistiquement significatives (p < 0,05 dans le test t). 

L’action de l’OMM

Le Bulletin décrit l’action engagée par l’OMM face à ces nombreux défis. Le Système d’annonce et d’évaluation des tempêtes de sable et de poussière (SDS-WAS) vise à fournir en temps utile des prévisions, observations et connaissances de grande qualité aux utilisateurs.

Il s’agit d’une plate-forme internationale qui met en relation chercheurs, centres d’exploitation et utilisateurs; elle est formée d’antennes régionales dont les activités sont coordonnées et exécutées par le centre régional qui leur est associé.

Le SDS-WAS comprend actuellement quatre antennes régionales de recherche:

  • Antenne pour l’Afrique du Nord, le Moyen-Orient et l’Europe (NAMEE) – Centre de Barcelone (Espagne);
  • Antenne pour l’Asie – Centre de Beijing (Chine);
  • Antenne pour les Amériques – Centre de Bridgetown (Barbade);
  • Antenne du Conseil de coopération du Golfe – Centre de Jeddah (Arabie saoudite).

Les efforts déployés par l’OMM pour diffuser des informations sur les tempêtes de sable et de poussière sont salués par l’ensemble des Nations Unies. L’OMM dirige les activités de prévision et d’alerte précoce au sein de la Coalition de lutte contre les tempêtes de sable et de poussière établie par l’ONU.

L’OMM continuera de collaborer avec ses partenaires en vue de mieux cerner les répercussions de cet aléa naturel et de fournir des informations fiables pour l’atténuer.

Pour de plus amples informations, veuillez contacter :

  • Clare Nullis Attachée de presse de l’OMM cnullis@wmo.int +41 79 709 13 97
  • WMO Strategic Communication Office Media Contact media@wmo.int
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