Communiquer pour sauver des vies: améliorer les messages dans les systèmes d’alerte précoce
- Author(s):
- Eliot Christian, Carolina Cerrudo, Elizabeth Viljoen, Nathan Cooper, Ronald Jackson, Vanessa Gray et Adanna Robertson-Quimby

Les dangers peuvent être naturels ou technologiques (ou causés par l’homme), et les situations à dangers multiples sont courantes. Lorsque les dangers s’enchaînent en cascade, ils peuvent conduire à une catastrophe de grande ampleur. Par exemple, une forte tempête de pluie peut provoquer des inondations, qui peuvent contaminer les sources d’eau et, par suite, provoquer une épidémie de choléra. Le risque de catastrophe peut être considéré comme une fonction à plusieurs facteurs, qui comprennent le danger, l’exposition, la vulnérabilité et le renforcement des capacités. Pour atténuer les risques et éviter que les dangers ne se transforment en catastrophes, les systèmes d’alerte précoce doivent pouvoir s’appuyer sur des partenariats, un environnement favorable, des communications améliorées, des mesures de renforcement des capacités et des messages efficaces exploitant tous les médias disponibles (voir la figure 1).
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Le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 appelle les pays à améliorer nettement l’accès des populations, des prestataires de services d’urgence et des secteurs marchands aux systèmes d’alerte précoce multidangers (MHEWS) et aux informations et évaluations relatives aux risques de catastrophe. Les systèmes d’alerte précoce, ou systèmes d’alerte en cas d’urgence, s’emploient à fournir des informations opportunes et exploitables au public ainsi qu’aux autres personnes intervenant dans les situations d’urgence. Ils aident les personnes à prendre des mesures qui permettent de sauver des vies et des moyens de subsistance dans les situations d’urgence, et évitent ainsi que ces situations ne dégénèrent en catastrophes.
La forte croissance des réseaux et services de technologies de l’information et de la communication (TIC) s’accompagne d’une augmentation du nombre de plates-formes et de canaux de communication et ouvre de nouvelles possibilités pour atteindre les communautés exposées. Avant et pendant une situation d’urgence, les systèmes d’alerte précoce peuvent exécuter des tâches telles que la surveillance des dangers, la prévision et la prédiction, l’évaluation des risques, la communication et d’autres activités qui permettent aux individus, aux communautés, aux gouvernements, aux entreprises et autres acteurs de prendre des mesures en temps utile pour protéger les vies et les moyens de subsistance. Cela nécessite de faire travailler ensemble des experts exerçant des rôles multiples et d’avoir une bonne compréhension des menaces, de l’environnement et des besoins des utilisateurs de l’information.
L’OMM encourage deux pratiques très répandues, qui renforcent les systèmes d’alerte précoce en misant sur l’amélioration des messages axés sur l’action:
- Le Protocole d’alerte commun (PAC), norme internationale qui sert à communiquer les faits essentiels relatifs à tout type d’urgence en exploitant tous les médias disponibles.
- Les services de prévision et d’alerte axées sur les impacts (IBFWS), qui délivrent des messages publics ciblés sur l’exposition et la vulnérabilité des personnes en danger.
Le PAC et les IBFWS sont complémentaires et sont souvent utilisés de pair.
Le Protocole d’alerte commun (PAC)
La norme internationale PAC (Recommandation X.1303 de l’UIT-T) permet de communiquer les faits essentiels relatifs à tous les types de danger en exploitant tous les médias disponibles:
- Quelle est la situation d’urgence?
- Où se trouve la zone concernée?
- Quand doit-on agir?
- Quelle est l’ampleur du danger?
- Quel est le degré de certitude des experts?
- Que doivent faire les populations?
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En général, les situations d’urgence complexes donnent lieu à l’intervention d’autorités multiples exerçant des responsabilités distinctes. À titre d’illustration, les organismes scientifiques et techniques sont experts dans l’art de caractériser un danger et ses incidences potentielles, mais ne sont généralement pas habilités à indiquer aux populations comment agir, par exemple si elles doivent évacuer. Les alertes PAC émises par ces organismes peuvent demander aux gens de «surveiller les médias locaux pour connaître les instructions des autorités civiles». Quant aux alertes PAC des autorités civiles, elles peuvent reprendre la description de la situation d’urgence fournie par l’organisme scientifique ou technique, et y ajouter des instructions telles que les itinéraires d’évacuation.
En cas d’urgence de grande ampleur, il est fréquent de voir intervenir plusieurs autorités dont les compétences se chevauchent et qui seront amenées à émettre davantage d’alertes au fil de l’évolution de la situation. Le fait que toutes les autorités d’alerte utilisent le PAC pour communiquer les faits essentiels à mesure que la situation d’urgence évolue permet de garantir la cohérence des messages (voir la figure 2). Cela vaut aussi bien pour les communications privées entre les autorités d’alerte et les organes affiliés que pour les messages adressés au public.
Comme la plupart des urgences portent sur des phénomènes de faible ampleur qui se produisent souvent, les populations apprennent à se familiariser avec les procédures d’alerte locales habituelles, telles que les alertes météorologiques. Les catastrophes, en revanche, se caractérisent par une ampleur beaucoup plus grande et une fréquence beaucoup moins élevée. Dans l’idéal, les systèmes d’alerte habituels devraient être capables de rehausser leur niveau de capacité pour gérer les alertes précoces aux catastrophes. Les populations seraient alors alertées de l’imminence d’une situation de catastrophe par le système qu’ils connaissent et auquel ils font confiance.
Avantages du PAC – Les sociétés du monde entier ont longtemps utilisé une mosaïque de systèmes d’alerte, souvent conçus pour des situations d’urgence particulières et des moyens de communication spécifiques. Ces approches disparates non seulement induisent un gaspillage de ressources, mais peuvent aussi être dangereuses si:
- les personnes passent à côté des alertes qu’elles auraient dû recevoir
- les personnes reçoivent des alertes qui ne leur sont pas destinées
- les personnes reçoivent des messages confus qu’il est difficile de confirmer.
Le PAC fonctionne pour tous les types d’urgence et de supports, car les messages émis combinent informations et données. Ils contiennent des informations textuelles que les gens peuvent lire, par exemple un titre, le nom d’un événement, une instruction et une description de la zone, ainsi que des données essentielles pour le traitement automatisé, comme le polygone de la zone et les valeurs codées.
Le PAC permet de diffuser des alertes plus rapidement et plus facilement. Pour émettre une alerte, les autorités peuvent passer des appels téléphoniques, envoyer des courriels ou publier des informations sur les médias en ligne, entre autres exemples, mais ces activités leur font perdre un temps précieux et les éloignent de leur mission clé consistant à rédiger des alertes exactes et exploitables. Avec le PAC, un message peut être diffusé rapidement sur plusieurs canaux d’alerte. Le PAC est donc le moyen le plus rapide et le plus fiable pour diffuser des messages d’alerte d’urgence auprès des personnes en danger.
Dans une situation d’urgence complexe, une multitude de types d’informations provenant d’une multitude de sources doivent être assimilés à toutes les échelles. Les alertes sont une composante importante de ces informations. Étant communiquées sur de très nombreux supports et dans de très nombreux formats, les alertes qui n’utilisent pas le PAC sont difficilement reçues, utilisées et partagées. La collecte et l’analyse des informations sont rendues beaucoup plus aisées par les alertes PAC, qui contribuent à donner une «vision commune de la situation» ou à maintenir une «image opérationnelle commune».
Les systèmes d’alerte publics traditionnels peinent à atteindre les personnes vulnérables – par exemple les aveugles, les sourds, les personnes souffrant de troubles cognitifs ou celles qui ne comprennent pas la langue utilisée dans l’alerte. Les fonctionnalités des données PAC peuvent être exploitées d’une manière qui permet de s’adresser à tous ces publics, et comprennent la traduction automatique.
Certains dangers surviennent si soudainement qu’entre une alerte donnée à temps qui permet de sauver des vies et une alerte qui arrive trop tard, il n’y a parfois qu’une différence de quelques secondes. Ces dangers comprennent par exemple les tremblements de terre, les tornades, les tsunamis, les crues éclair, les éruptions volcaniques, les glissements de terrain et les avalanches. Les alertes PAC peuvent être émises immédiatement, au travers d’une infrastructure en ligne qui les diffuse instantanément vers de nombreux médias.
Les messages PAC sont en format numérique, ce qui permet aux personnes et aux dispositifs tels que sirènes, panneaux de signalisation, commandes des trains et autres mécanismes automatisés d’enclencher immédiatement des actions qui contribuent à sauver des vies. Par exemple, l’Organisation nationale de gestion des urgences de Saint-Vincent-et-les Grenadines a utilisé le PAC en avril 2021 pour émettre une alerte publique liée à une éruption volcanique.
Eruption volcanique à Saint-Vincent-et-les Grenadines, 2021
Si 85 % de la population mondiale vivent dans des pays qui utilisent le PAC, l’application de ce protocole est particulièrement faible dans les pays en développement et, en particulier, les 46 pays les moins avancés (PMA), qui sont pourtant les plus vulnérables aux catastrophes (Christian, 2022). C’est pourquoi les organisations internationales, les ONG internationales et les entreprises multinationales intervenant dans le domaine des alertes en cas d’urgence sont priées instamment de souscrire à l’Appel à l’action sur les alertes en cas d’urgence:
Intensifier collectivement les efforts pour faire en sorte que, d’ici à 2025, tous les pays disposent d’une capacité d’alerte en cas d’urgence efficace et faisant autorité qui s’appuie sur le Protocole d’alerte commun (PAC), adapté à tous les médias et à tous les risques.
Connaître les sources qui font autorité – Si le PAC est très utile pour communiquer des faits essentiels, encore faut-il avoir la certitude que ces faits sont exacts. Attendu que les alertes reposent sur de vastes réseaux comme Internet, il n’est pas possible de connaître personnellement toutes les sources. Comment le public peut-il savoir qu’une source d’alerte est reconnue officiellement comme faisant autorité? L’OMM et l’UIT ont créé en 2009 le Registre international des autorités d’alerte précisément dans ce but. Ce registre est en quelque sorte un service de recommandation – l’utilisateur a une certaine confiance dans l’autorité d’alerte enregistrée parce qu’il fait confiance aux institutions qui l’ont enregistrée. Chaque Représentant permanent de l’OMM gère les entrées du registre pour son pays. Il représente l’ensemble de la nation et doit enregistrer toutes les autorités d’alerte reconnues dans son pays.
Centres d’alerte PAC – Un centre d’alerte PAC offre un accès simplifié à des alertes PAC agrégées. Cette agrégation est rendue nécessaire par le fait qu’il existe actuellement plusieurs milliers de fils d’informations d’alerte en format PAC actifs. Les alertes peuvent être regroupées en fonction d’un thème, d’une période ou d’une échelle géospatiale: ville, province, pays, région ou monde.
Centres d’alerte PACÀ l’échelon national, le système intégré d’alerte publique (IPAWS) des États-Unis d’Amérique est un centre d’alerte PAC qui rassemble les alertes de plus de 1 600 autorités d’alerte. À l’échelon régional, MeteoAlarm agrège les alertes de 37 Services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN) en Europe. À l’échelon mondial:
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Services de prévision et d’alerte axées sur les impacts
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La prévision axée sur les impacts est une approche structurée qui combine les informations relatives aux dangers et les données sur l’exposition et la vulnérabilité dans le but de recenser les risques et d’appuyer la prise de décision (voir la figure 3). Son objectif ultime est d’encourager des interventions précoces permettant de réduire les dommages et les pertes en vies humaines dus aux dangers naturels, en délivrant des informations sur le danger considéré, ses impacts potentiels et les mesures recommandées pour limiter autant que possible les effets de ces impacts sur la société (CESAP, 2021; OMM, 2021).
L’introduction du concept de risque dans la prévision météorologique est ni plus ni moins qu’un changement de paradigme: l’information n’indique plus «quel temps il fera» mais «ce que fera le temps». Les Directives de l’OMM sur les services de prévision et d’alerte multidanger axées sur les impacts, partie II: Mise en œuvre des services de prévision et d’alerte multidanger axées sur les impacts (OMM-No 1150) se concentrent sur les partenariats, la formation, la communication, la valeur des IBFWS et des informations sur les impacts, et les méthodes d’analyse. L’accent est mis ici sur certains aspects traités dans les chapitres des Directives consacrés aux partenariats et à la communication; pour autant, on ne saurait sous-estimer l’importance de la disponibilité des données sur les impacts, l’exposition et la vulnérabilité pour la concrétisation de ce changement de paradigme dans les services de prévision météorologique.
De nombreux acteurs jouent un rôle crucial dans la gestion des urgences: autorités gouvernementales, institutions internationales, ONG, organismes d’aide humanitaire, organisations de bénévoles, initiatives communautaires et divers autres intervenants aux niveaux local, national, régional et international. En fonction de l’ampleur de l’urgence, plusieurs niveaux de gouvernement sont susceptibles d’intervenir pour gérer l’urgence, que ce soit dans un rôle opérationnel ou de surveillance. Les autorités gouvernementales concernées peuvent comprendre un large éventail d’entités: l’organisme chargé de coordonner les interventions gouvernementales, l’autorité de réglementation des télécommunications, les organismes scientifiques ou techniques spécialistes du danger naturel ou technologique face auquel il faut agir, ou encore les services d’intervention tels que la police, les pompiers, la protection civile et le personnel de santé. Dans le cas où la catastrophe est nationale ou s’étend au-delà des frontières, le chef du gouvernement et le Ministère des affaires étrangères sont également appelés à intervenir. Nombre d’institutions nationales jouant un rôle clé dans la gestion des situations d’urgence ont des homologues intergouvernementaux au sein du système des Nations Unies qui peuvent leur prêter assistance, notamment en ce qui concerne les aspects transfrontaliers et la coordination.
Par conséquent, l’un des facteurs essentiels de l’efficacité d’un IBFWS est l’établissement de partenariats réunissant un large éventail d’acteurs clés. L’objectif de ces partenariats est d’améliorer la riposte globale aux dangers et d’éviter les situations de catastrophe et autres conséquences délétères. Il importe que les prestataires de services météorologiques et les décideurs nouent des collaborations renforcées et approfondies, dans lesquelles les rôles et les responsabilités seront définis aussi clairement que possible et qui disposeront de ressources suffisantes pour assurer un engagement continu et durable.
Les parties prenantes à la prestation de services devront collaborer pour que leurs initiatives disposent de ressources suffisantes, s’inscrivent dans le long terme, soient harmonisées et produisent un réel impact. Dans les Caraïbes, par exemple, des efforts ont été déployés pour mettre en place un mécanisme de coordination visant à cerner et définir une ambition générale, à déterminer les domaines prioritaires et à harmoniser les programmes et les investissements dans les projets. Les scientifiques, les technocrates, les décideurs et les utilisateurs, ainsi que les organisations internationales, locales et du secteur privé sont tous des acteurs clés des systèmes d’alerte précoce.
La formation est une composante importante des IBFWS et de leurs partenariats. L’exploitation de ces services impose de comprendre des informations qui ne sont pas abordées dans les formations officielles en météorologie, raison pour laquelle il est nécessaire de renforcer les compétences au sein des SMHN et des organisations partenaires. Pour que les IBFWS progressent, les organisations partenaires doivent fournir les moyens de développer les aptitudes et les compétences requises, ainsi que ses informations sur la façon dont les partenaires utilisent mutuellement les informations disponibles pour exécuter leur mandat.
Une fois que les partenariats essentiels et stratégiques sont en place et que les informations nécessaires ont été collectées, celles-ci doivent être communiquées de manière efficace.
Il faut viser l’excellence en matière de communication pour assurer le transfert efficace des informations, des connaissances et des données d’expérience entre les partenaires. Les bonnes pratiques de communication renforcent la confiance. De nombreux pays font appel à des conseillers ayant de bonnes connaissances en météorologie pour combler les lacunes de la communication et servir d’intermédiaires entre le SMHN et ses partenaires.
De même, les risques associés à un danger déterminé doivent être communiqués pour que des mesures appropriées puissent être prises. La finalité des IBFWS est d’aboutir à des interventions efficaces, et une communication claire et compréhensible des risques potentiels est une condition essentielle pour y parvenir. La communication des risques est étroitement liée à la communication des probabilités.
Pour pouvoir adopter un comportement adéquat face à un danger, les personnes doivent avoir une idée précise des risques – pour elles-mêmes ou, si elles agissent au nom d’un organisme, pour protéger les communautés, les installations ou les infrastructures dont elles sont responsables. Les IBFWS donnent une vue d’ensemble des notions de sensibilisation et de champ d’atteinte, et décrivent une approche structurée indiquant quel niveau d’information associer à chaque moyen de communication (voir la figure 4).
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Figure 4. Les étapes que doit suivre le processus de communication des risques appliqué aux prévisions et aux alertes peuvent être illustrées au moyen d’un modèle de type REACH:
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Les radiodiffuseurs et autres médias jouent un rôle crucial dans la diffusion d’informations pertinentes avant, pendant et après les catastrophes. Citons notamment les fournisseurs de services de communication fixe et sans fil, les exploitants de satellites, les réseaux de radiocommunication pour la sécurité publique, les télédiffuseurs et radiodiffuseurs et les fournisseurs de services Internet, entre autres. À l’heure actuelle, plus de 60 % (4,9 milliards de personnes) de la population mondiale utilisent Internet (UIT, 2021). Cet essor s’est accompagné de l’apparition de nombreux nouveaux services d’alerte en cas d’urgence, notamment des applications mobiles ou des systèmes d’alerte fondés sur de telles applications. Les IBFWS doivent faire preuve d’agilité pour s’adapter à ce rythme et intégrer à leur panoplie d’outils les médias sociaux et d’autres technologies de communication émergentes permettant de diffuser des messages clairs et cohérents.
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Des recherches indiquent que les messages d’alerte en cas d’urgence sont souvent jugés peu clairs. Parfois, les messages sont compris mais la façon dont ils sont rédigés n’incite pas à l’action. Le document de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) intitulé «Public awareness and public education for disaster risk reduction: key messages» (Sensibilisation et éducation du public à la prévention des catastrophes: messages clés) propose un ensemble de messages pertinents à l’échelle mondiale et testés in situ, applicables à différents types de dangers et niveaux d’alerte (voir la figure 5). Les messages peuvent être adaptés et harmonisés par les gouvernements nationaux et les organisations de la société civile, pour faire émerger un corpus commun de messages approuvés pouvant être transmis en association avec des alertes aux dangers. Cela permet de garantir que les habitants d’un pays reçoivent les mêmes informations sur les mesures à prendre pour rester en sécurité, quelle que soit la source dont proviennent ces informations. Les messages PAPE sont fondés sur des études de cas dans lesquelles des personnes exposées ont reçu et compris des messages d’urgence, et pris les mesures qui s’imposaient.
Internet, les réseaux sociaux, les opérateurs de téléphonie mobile et les applications intelligentes peuvent communiquer certains types d’informations et d’alertes officielles qui tiennent le public informé. Les systèmes d’alerte basés sur des sirènes ou des alarmes sonores reliées à des capteurs peuvent être utiles pour déclencher rapidement une alerte dans certaines circonstances, lorsqu’un seuil déterminé est atteint. Les réseaux satellitaires fournissent des services de communication qui sont très peu dépendants des infrastructures terrestres. Les services de télécommunication privés comprennent les réseaux destinés aux pompiers, à la police, aux ambulances, aux équipes de secours, à la protection civile, aux transports et aux services collectifs ainsi qu’à d’autres entités des secteurs public et privé.
L’UIT a estimé que, à la fin de 2021, 95 % de la population mondiale auraient accès à un réseau mobile haut débit. En 2021, on dénombrait plus de 6 milliards d’abonnements actifs au haut débit mobile dans le monde. Les services mobiles sont devenus un élément essentiel de la vie de la plupart des gens. Un nombre croissant de pays mettent à profit les réseaux et les technologies cellulaires – par exemple les technologies de géolocalisation comme le service de messages courts (SMS) ou la diffusion cellulaire – pour diffuser des messages d’alerte. Certains mettent en place des réglementations spécifiques. À mesure de leur essor, les réseaux, services et plates-formes de télécommunication impriment leur marque sur la façon dont les gens acquièrent des informations et jouent un rôle de plus en plus important dans les systèmes d’alerte précoce, offrant davantage de possibilités pour diffuser des messages d’alerte en temps utile aux personnes exposées. Par exemple, l’envoi d’un même message d’alerte PAC sur plusieurs plates-formes augmente la couverture et l’impact du message et réduit les risques de confusion. Le PAC représente la meilleure option pour communiquer auprès de l’ensemble des audiences – publiques, privées, commerciales – dans n’importe quelle situation d’urgence (voir la figure 6).
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Démontrer la valeur des IBFWS
S’il existe de nombreuses méthodes pour recueillir des informations sur les conditions météorologiques, aucune norme mondiale n’encadre la collecte de données sur les impacts, de sorte qu’il est difficile de démontrer la valeur des IBFWS. Or les informations sur les impacts peuvent provenir de différences sources, telles que les ministères, les journaux ou les universités.
Pour valider les avantages socio-économiques des IBFWS, il convient de rassembler et d’analyser des études de cas pouvant démontrer leur valeur pour les décideurs de premier plan au sein des administrations publiques et d’autres secteurs, ainsi que pour les partenaires actuels et potentiels. Il n’existe pas d’indicateur unique pour mesurer la valeur de ces services, mais trois grandes catégories de critères: la rapidité, la pertinence et les résultats. Le chapitre 5 des Directives de l’OMM susmentionnées donne quelques exemples de la manière dont la valeur peut être mesurée. Il est important de calculer cette valeur car c’est un moyen d’améliorer les produits et les services.
Créer des environnements favorables
La législation, les règles et les règlements nationaux ont un rôle très important à jouer pour établir un environnement favorable à la gestion des urgences. Ces instruments peuvent définir les responsabilités des différents intervenants dans la gestion des urgences et déterminer les mécanismes de coordination. Le Plan national pour les télécommunications d’urgence (NETP) est un document de planification nationale particulièrement stratégique pour les systèmes d’alerte précoce. Le NETP définit une stratégie qui vise à assurer la disponibilité des communications durant toutes les phases d’une catastrophe, en favorisant la coordination entre tous les niveaux d’administration, entre les organismes public et privé, et au sein des communautés exposées. Certains pays ont également adopté des réglementations spécifiques pour garantir l’accès des communautés exposées à des plates-formes et des canaux de communication numériques. Par exemple, l’Article 110(1) du Code des communications électroniques européen stipule que, au plus tard le 21 juin 2022, les systèmes d’alerte du public devront:
- être en mesure d’envoyer des alertes d’urgence ciblées géographiquement (Journal officiel de l’Union européenne, 2018)
- pouvoir fonctionner sans exigence de consentement actif (Journal officiel de l’Union européenne, 2018)
- être suffisamment exacts pour atteindre rapidement un pourcentage très élevé de personnes, y compris les visiteurs dans leur langue maternelle (Journal officiel de l’Union européenne, 2018)
Il reste encore beaucoup à faire
La norme internationale PAC permet de communiquer les faits essentiels d’une situation d’urgence pour tous les types de dangers et en exploitant tous les médias. Les services IBFWS offrent une approche structurée qui combine les informations relatives aux dangers et les données sur l’exposition et la vulnérabilité dans le but de recenser les risques et d’appuyer la prise de décision, l’objectif ultime étant d’encourager des interventions précoces pour réduire les dommages et les pertes en vies humaines dus aux dangers naturels. L’utilisation complémentaire du PAC et des IBFWS offre des avantages manifestes en termes d’amélioration des systèmes d’alerte précoce. Même si de nombreux progrès ont été réalisés au niveau mondial pour promouvoir ces pratiques, il reste encore beaucoup à faire.
Une évaluation factuelle des systèmes d’alerte précoce réalisée à la demande de l’OMM en 20181, suite à la saison des ouragans 2017 dans les Caraïbes, montre que les pertes en vies humaines, en moyens de subsistance et en biens sont encore excessives. L’étude indique «[qu’]avec le changement climatique et le développement littoral rapide, il reste prioritaire pour les pays de la région de renforcer leur capacité de lancer des alertes précoces multidangers conduisant à des interventions efficaces de la part des institutions et des populations».
Le Cadre de Sendai préconise que les systèmes d’alerte précoce permettent aux individus et aux communautés menacés d’agir à temps et de façon adaptée afin de réduire les risques de blessures, de décès et de dégâts matériels et sur l’environnement. Au vu des objectifs fixés par le Cadre de Sendai pour 2030, le PAC et les IBFWS, les environnements favorables, la collaboration et les partenariats renforcés et la communication seront des éléments essentiels pour améliorer l’efficacité des initiatives de réduction des risques de catastrophe.
Notes de bas de page
1 Financée par l’Initiative sur les systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques (CREWS).
Auteurs
Par Eliot Christian (consultant), Carolina Cerrudo, Service météorologique national argentin (SNM), Elizabeth Viljoen, Service météorologique sud-africain (SAWS), Nathan Cooper, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), Ronald Jackson, Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Vanessa Gray, Union internationale des télécommunications (UIT), et Adanna Robertson-Quimby, Secrétariat de l’OMM
Références
Christian, E., 2022: CAP Implementations Status Report.
International Telecommunication Union (ITU), 2021: Internet, Use, Facts and Figures.
Official Journal of the European Union, 2018: Directive 2018/1972 of the European Parliament and of the Council, 15 December.
United Nations Economic and Social Commission for Asia and the Pacific (ESCAP)/World Meteorological Organization (WMO), 2021: Manual for Operationalizing Impact-based Forecasting and Warning Services (IBFWS), Thailand.
WMO, 2021: WMO Guidelines on Multi-hazard Impact-based Forecast and Warning Services, Part II: Putting Multi-Hazard IBFWS into Practice (WMO-No. 1150). Geneva.
WMO, 2015: WMO Guidelines on Multi-hazard Impact-based Forecast and Warning Services (WMO-No. 1150). Geneva.